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Assujettissement des sociétés d'investissement à la LBA

Les rapports entre la loi sur les placements collectifs de capitaux (LPCC) et la loi sur le blanchiment d’argent (LBA) sont complexes. Les directions de fonds sont soumises à la LBA, « …pour autant qu’elles gèrent des comptes de parts ou quelles offrent ou distribuent elles-mêmes des parts de placement collectif » (art. 2 al. 2 lit. b LBA). Cela alors même qu’en pratique elles délèguent systématiquement leurs obligations en matière de lutte anti-blanchiment d’argent à la banque dépositaire. Les véhicules de placement collectif nouvellement introduits par la LPCC – soit les sociétés d’investissement à capital variable (SICAV), les sociétés d’investissement à capital fixe (SICAF) et les sociétés en commandite de placement collectifs – sont également assujettis à la LBA, aux mêmes conditions (art. 2 al. 2 lit. b bis LBA). Enfin, la situation des gestionnaires de placements collectifs au regard de la LBA est encore plus alambiquée : ils tombent dans le champ d’application de la LBA s’ils remplissent la condition supplémentaire d’être assujettis à la LPCC. Si par contre ils gèrent des placements collectifs étrangers soumis à une surveillance équivalente à celle de la Suisse, sans pour autant devoir faire eux-mêmes l’objet d’une surveillance prudentielle en vertu du droit étranger (ce qui sera par exemple le cas d’un fonds non OPCVM ou dit « Partie II » de la loi luxembourgeoise), les gestionnaires de fortune sortent du champ d’application de la LPCC et échappent complètement à la LBA en vertu de l’art. 2 al. 4 lit. d LBA. Seuls les gestionnaires de placements collectifs étrangers non soumis à une surveillance équivalente sont donc considérés comme des intermédiaires financiers au sens de la LBA. Ils doivent alors s’affilier auprès d’un organisme d’auto-régulation (OAR) ou se soumettre à la surveillance directe de l’Autorité de contrôle.
Dans son projet de modification de l’ordonnance CFB sur le blanchiment d’argent mise en audition en juillet 2007, la CFB propose opportunément de n’assujettir les directions de fonds et les SICAV que dans la mesure où les obligations découlant de la LBA ne sont pas assumées par la banque dépositaire. Dans le cas de figure, tout à fait exceptionnel, où la banque dépositaire ne se chargerait pas de ces tâches, les directions de fonds et les SICAV se verraient soumises à la surveillance directe de la CFB en matière de lutte anti-blanchiment. Logiquement, pour les mêmes motifs de cohérence liés à une surveillance unique, les SICAF, les sociétés en commandite de placement collectif et les gestionnaires de fortune au sens de la LPCC sont également surveillés directement par la CFB.
Les SICAF ne sont cependant assujetties à la LPCC qu’à certaines conditions. Ainsi, elles échappent à la LPCC dans la mesure où elles revêtent la forme d’une société anonyme et sont soit cotées à une bourse suisse, soit ouvertes qu’à des investisseurs qualifiés. Dans ce dernier cas, elles doivent avoir des actions nominatives et mandater un organe de révision reconnu par la CFB pour attester chaque année qu’elles remplissent ces conditions. L’Autorité de contrôle vient donc de confirmer que ces sociétés d’investissement, bien qu’échappant au champ d’application de la LPCC, demeurent pleinement assujetties à la LBA. Elles devront donc, d’ici au 28 février 2008 au plus tard, pouvoir attester de leur qualité de membre d’un OAR reconnu, réactiver leur dossier pendant auprès de l’Autorité de contrôle ou confirmer leur qualité de membre de la Swiss Association of Investment Companies (SAIC) et leur engagement de devenir membre de l’OAR de cette association. Comme indiqué ci-dessus, les sociétés d’investissement qui entrent dans le champ de la LPCC sont quant à elles des intermédiaires financiers soumis à la surveillance anti-blanchiment directe de la CFB. Il en va différemment des sociétés holding qui ne sont pas considérées comme des intermédiaires financiers et ne tombent par conséquent pas dans le champ de la LBA.
La fusion prochaine de l’Autorité de contrôle et de la CFB dans le cadre de la FINMA ne simplifiera pas forcément beaucoup les choses, dès lors que les OAR continueront d’exister parallèlement à la FINMA. En raison de la délégation systématique de leurs devoirs de diligence, l’assujettissement à la LBA de plusieurs acteurs de la LPCC, tels les directions de fonds, les SICAV et les gestionnaires de placements collectifs ouverts de droit suisse n’entraîne cependant que peu de conséquences pratiques. Si l’on ajoute à cela le fait que les banques dépositaires des placements collectifs échappent généralement à l’obligation d’identifier les ayants-droit économiques en raison du fait que les investisseurs souscrivent aux fonds via leur propre banque (c’est-à-dire un établissement surveillé agissant comme nominee), on s’aperçoit que la complexité théorique du système est souvent inversement proportionnelle à sa simplicité pratique.