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Evaluation de la stabilité du secteur financier suisse

Début juin, le Fonds monétaire international (FMI) a publié une version actualisée de son évaluation de la stabilité du secteur financier suisse (Financial System Stability Assessment Update), effectuée en 2001 dans le cadre du Financial Sector Assessment Program. Les résultats de l’analyse sont accompagnés de recommandations adressées aux autorités compétentes suisses.
Surveillance, réglementation, entraide administrative
Tout en affichant son soutien aux objectifs poursuivis par le projet de loi sur l’autorité de surveillance des marchés financiers (P-LAUFIN), le FMI n’a pas manqué de soulever que certaines dispositions pourraient entraver les efforts visant à assurer l’indépendance de la nouvelle autorité (FINMA). Il s’agit des questions relatives à la détermination de la stratégie et de la politique applicables au secteur financier, au statut des collaborateurs de la FINMA ainsi qu’à l’approbation des taxes de surveillance, questions qui restent dans le domaine de compétence du Conseil fédéral (cf. actualité n° 497 du 7 mars 2007->art497]). Dans son [communiqué de presse du 4 juin dernier présentant l’analyse du FMI, le Département fédéral des finances (DFF) a affirmé son attachement à l’indépendance de la FINMA, tout en déclarant que la Suisse « ne partage cependant pas les réserves du FMI concernant certaines dispositions du projet de loi ». Un autre point de désaccord porte sur l’art. 7 P-LAUFIN qui oblige la FINMA à respecter le principe de proportionnalité dans son activité de réglementation. Contrairement aux autorités suisses, le FMI est d’avis que ce principe pourrait restreindre la capacité de la FINMA d’exercer une surveillance efficace. Enfin, selon le FMI, la FINMA devrait être dotée du pouvoir de prononcer des sanctions pécuniaires, à la place du DFF. En revanche, le FMI se dit très satisfait des récents développements dans le domaine de l’entraide administrative (assouplissement de l’art. 38 LBVM, accord tripartite entre les autorités de surveillance suisses, états-uniennes et britanniques, coopération intensifiée, etc.).
Banques
L’analyse du secteur bancaire se concentre principalement sur les deux grandes banques suisses. Le rapport rappelle leur importance en termes de parts de marché national mais aussi le rôle qu’elles occupent sur les marchés alternatifs. À l’échelle internationale, elles comptent en effet parmi les dix plus grandes contreparties sur le marché des dérivés de crédit et n’ont pas cessé d’accroître leurs expositions aux hedge funds. Ces transactions présentent des risques spécifiques qui nécessitent, selon le FMI, une surveillance intensifiée, orientée davantage vers les risques de marché et basée sur des exigences en fonds propres flexibles, modulables en fonction de l’évolution du profil de risques de chaque banque. Face à cette recommandation, les autorités suisses se disent déjà disposées à revoir les exigences minimales relatives aux fonds propres. La surveillance du niveau de liquidités mérite également d’être intensifiée, et ce malgré une résistance remarquable que les deux grandes banques démontrent à l’issue des tests de stress. Le FMI l’explique par l’importance systémique que revêt leur capacité de faire face aux risques de défaut ou aux dysfonctionnements dans le financement transfrontalier. Quant aux banques cantonales, le rapport fait ressortir la nécessité d’améliorer leur gouvernance d’entreprises ainsi que de les protéger contre les ingérences politiques dans leurs activités opérationnelles. Dans son ensemble, le secteur bancaire se montre résistant à divers chocs macroéconomiques.
Assurances
Le principal enseignement tiré des résultats des tests effectués dans le cadre du Swiss Solvency Test porte sur la nécessité pour les assureurs suisses d’accorder davantage d’attention aux risques de marché. En effet, le test démontre que plusieurs assureurs se trouveraient en difficultés financières en cas de correction d’évaluation et de baisse des taux d’intérêt. C’est la raison pour laquelle le FMI suggère une surveillance renforcée des assureurs à haut risque et, le cas échéant, l’application de mesures correctives correspondantes (augmentation du capital, réduction des expositions aux risques). L’étude soulève également la question du niveau des placements intra-groupes. Le FMI le juge élevé et met en garde contre les risques qu’il présente : effet domino mais aussi risque de solvabilité et de liquidité si les restrictions de circulation de capitaux entre les entités du groupe devaient être imposées.
Prévoyance professionnelle
Après avoir constaté que les caisses de pension avaient largement réussi à combler les pertes engendrées par l’effondrement des actions au début des années 2000, le FMI s’interroge sur la capacité des caisses de pensions à écarter tout risque de découvert en cas de crise. Les résultats des tests de stress effectués révèlent la vulnérabilité d’une majorité de caisses à cet égard. Un autre sujet traité par le FMI porte sur l’actuel système de surveillance des institutions de prévoyance professionnelle. Sans surprise, l’étude met en exergue son caractère fragmenté et insuffisant. Le FMI salue la réforme structurelle de la prévoyance professionnelle lancée en juillet 2006 et qui a donné lieu, le 15 juin dernier, à un Message du Conseil fédéral. La réforme vise à harmoniser les règles de surveillance, tout en laissant aux cantons le soin de leur mise en œuvre . Une nouvelle autorité de haute surveillance devrait être créée, garante d’une pratique uniforme des autorités de surveillance cantonales et habilitée, entre autres, à adopter des directives, à reconnaître des standards professionnels et à déclarer comme généralement contraignantes certaines règles déontologiques. Le projet compte sur une professionnalisation des autorités cantonales et encourage à cette fin leur regroupement à travers des concordats régionaux (phénomène que connaissent déjà certaines régions alémaniques). Ce faisant, le Conseil fédéral n’a pas entièrement suivi la Commission d’experts qui proposait dans son Rapport de mars 2006 la mise en place d’un véritable système de surveillance prudentielle, à l’instar de celui qui existe dans le secteur bancaire, ainsi que la suppression des restrictions dans le domaine de la gestion de fortune institutionnelle (art. 49ss OPP 2). A défaut d’une telle approche prudentielle basée sur le risque, le FMI conclut que ces prescriptions de placement présentent probablement plus d’avantages que d’inconvénients. Toujours dans la même optique, le taux d’escompte, par le biais duquel on évalue les engagements, devrait, selon le FMI, intégrer les paramètres de marché. Cet avis n’est pas sans rappeler la proposition de la Commission d’experts de « dépolitiser » le taux d’intérêt technique. Enfin, le FMI prône également un renforcement du gouvernement d’entreprise et des standards de gestion des risques.