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Admissibilité d'un système d'échange d'informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients

Dans un arrêt du 23 novembre 2006 (C-238/05
), la Cour de Justice a répondu à une demande préjudicielle posée par la Cour Suprême espagnole. En 1999, le Tribunal de Défense de la Concurrence a exempté des règles de la concurrence le système d’échange d’informations entre établissements financiers sur la solvabilité des clients. Un tel système, crée et géré par l’Association nationale des établissements financiers, a pour but de maintenir une base de données pour permettre la fourniture d’informations sur la solvabilité des débiteurs et les risques encourus par les établissements opérant dans le domaine des activités de prêt et de crédit. Ausbanc, l’Association des utilisateurs de services bancaires, a introduit un recours contre ladite exemption auprès de la Cour Suprême.
Sur le fond, la Cours de Justice répond à deux questions : premièrement, à la question de savoir si l’accord restreint la concurrence au sens de l’art. 81 al. 1 CE ; deuxièmement, si l’accord peut être exempté en se fondant sur l’art. 81 al. 3 CE. Concernant la restriction de la concurrence, la Cour de Justice considère qu’un système d’échange d’informations sur la solvabilité des clients entre les établissements financiers n’a pas pour effet de restreindre la concurrence, pour autant que le marché pertinent n’est pas concentré, que ce système ne permet pas d’identifier les créanciers et que les conditions d’accès et d’utilisation pour les établissements financiers ne sont pas discriminatoires. La condition relative à la concentration souligne le risque particulier associé à l’échange d’informations dans de tels marchés. En effet, l’échange d’informations permet aux entreprises de connaître la position et la stratégie commerciales de leurs concurrents sur le marché, faussant ainsi la rivalité et augmentant la probabilité de collusion. La Cours de Justice considère, toutefois, qu’un tel système améliore l’offre de crédit en réduisant le taux de défaillance des créditeurs, partant les coûts de crédit pour les établissements bancaires, et en conséquence les taux d’intérêt pour tous les utilisateurs.
Quant à une exemption en vertu de l’art. 81 al. 3 CE, la Cour Suprême espagnole a posée la question de savoir si la condition selon laquelle une partie équitable du profit doit être réservée aux consommateurs, implique que chaque utilisateur doit tirer profit individuellement d’un tel système. En effet, Ausbanc objecte que, suite à l’utilisation de ce système, certains utilisateurs seront confrontés à des majorations de taux d’intérêt ou à un refus de crédit. En rejetant cet argument, la Cour de Justice observe tout d’abord que le système en cause est de nature à prévenir les situations de surendettement pour les consommateurs de crédit et à entraîner une disponibilité plus grande du crédit. La Cour de Justice clarifie ensuite la portée de l’art. 81 al. 3 CE : la condition selon laquelle une partie équitable du profit doit être transférée aux consommateurs doit être appréciée en examinant l’incidence des effets positif de l’accord sur l’ensemble des consommateurs et non pas sur chaque membre de cette catégorie de consommateurs. Cette clarification est importante en ce qu’elle confirme l’objectif de la prise en compte des intérêts des consommateurs en général, tout en distinguant l’objectif suivi par le droit de la concurrence de celui de la législation relative à la protection des consommateurs.