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Offres publiques d'acquisition : la directive européenne enfin adoptée

Le 21 avril 2004, le Parlement européen et la Commission européenne ont (enfin) adopté une directive sur les offres publiques d’acquisition qui est entrée en vigueur le 20 mai 2004. Les Etats membres disposent d’un délai au 20 mai 2006 pour en transposer les dispositions dans leur droit national. Produit de plus de quinze années de tractations très difficiles, si souvent reportée que peu d’intéressés pariaient encore sur son adoption, la nouvelle directive n’est que l’ombre des divers projets antérieurs, notamment de celui de 2002. Si elle inclut un certain nombre de principes généraux très largement admis comme l’exigence d’égalité de traitement, d’information claire aux destinataires de l’offre, de durée minimum et maximum de l’offre (2 à 10 semaines), la directive reste très peu contraignante dans deux domaines sensibles : les mesures de défense et les restrictions aux transferts de titres.
D’une part, elle prévoit à l’article 9 une interdiction pour le Conseil d’administration « d’entreprendre toute action susceptible de faire échouer l’offre », sans autorisation préalable des actionnaires dès qu’une offre est annoncée (ou imminente). Mais l’article 12 autorise les Etats membres, sous le titre évocateur d' »arrangements facultatifs », à choisir de ne pas appliquer cette règle.
D’autre part, l’article 11 prévoit de manière générale que les restrictions aux transferts des titres (statutaires et conventionnelles) sont inopposables à l’offrant pendant la période d’offre ; la même règle s’applique aux restrictions au droit de vote. Ici encore, l’article 12 permet de déroger aux principes plutôt favorables aux OPA instaurés par l’article 11.
Enfin, la directive exempte les « droits spéciaux » (golden share) détenus par les Etats membres dans les sociétés cotées de l’application de l’article 11. On se souviendra toutefois que la Cour européenne avait censuré la « golden share » de l’Etat français dans TotalFinaElf. Il n’est ainsi pas exclu qu’elle considère que certains de ces droits spéciaux ne sont pas compatibles avec le traité.
La directive présente cependant l’avantage de consacrer l’institution de l’offre obligatoire (dont le seuil décisif sera fixé par les Etats), de prévoir un standard minimum d’information, d’organiser tant un retrait qu’un rachat obligatoire lorsque 95 % (au plus) des droits de vote sont détenus par l’offrant. En outre, elle reconnaît comme autorités nationales de contrôle tant des organismes privés que publics et prévoit une coopération transnationale en la matière.
Seul l’examen des règles nationales de transposition permettra de déterminer dans quelle mesure la directive va favoriser les acquisitions transfrontalières ou au contraire renforcer les protectionnisme de certaines législations actuelles. L’adoption de la directive 2004/25 (qui avait commencé sa carrière sous le chiffre maudit de 13) n’est peut-être que le début d’une nouvelle saga.